Numéro EORI : qu'est-ce que c'est et en ai-je besoin ?
- Sophie Hugues
- 5 minutes de lecture
Les échanges commerciaux avec les départements et collectivités d’outre-mer impliquent des formalités douanières spécifiques dont la complexité surprend parfois les opérateurs économiques. Au cœur de ces procédures se trouve un identifiant souvent méconnu mais absolument fondamental : le numéro EORI. Ce code unique constitue la clé de voûte administrative pour quiconque souhaite exporter ou importer des marchandises vers ou depuis les territoires ultramarins.
La réglementation douanière applicable aux DOM-TOM présente des particularités notables en comparaison avec les échanges intra-métropolitains. Ces spécificités, liées au statut juridique variable des différents territoires, rendent indispensable la maîtrise des outils d’identification douanière. Le numéro EORI s’inscrit donc dans un contexte réglementaire complexe qui mérite d’être décrypté pour tous les acteurs économiques concernés.
Qu'est-ce que le numéro EORI et pourquoi est-il essentiel pour les DOM-TOM ?
Définition et cadre légal du numéro EORI
L’acronyme EORI signifie « Economic Operator Registration and Identification » (Enregistrement et Identification des Opérateurs Économiques). Concrètement, il s’agit d’un identifiant unique attribué par les autorités douanières aux entreprises et personnes effectuant des activités couvertes par la législation douanière de l’Union européenne.
Ce système d’identification a été institué par le Code des Douanes de l’Union (CDU) et s’applique selon des modalités variables aux territoires ultramarins. Il faut bien comprendre que tous les DOM-TOM ne sont pas soumis aux mêmes règles en la matière :
- Les Départements d’Outre-Mer (Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion, Mayotte) sont intégrés au territoire douanier de l’Union européenne.
- Les Collectivités d’Outre-Mer (Polynésie française, Nouvelle-Calédonie, Saint-Pierre-et-Miquelon, etc.) disposent quant à elles d’un statut douanier distinct.
Cette distinction fondamentale explique pourquoi le numéro EORI métropolitain n’est pas systématiquement valable pour tous les territoires ultramarins. Certaines collectivités nécessitent des démarches spécifiques ou des numéros d’identification distincts.
Rôle dans les échanges commerciaux avec l'outre-mer
Le numéro EORI joue un rôle crucial à plusieurs niveaux dans la chaîne logistique vers les DOM-TOM :
- Sécurisation des flux commerciaux – En permettant l’identification précise des opérateurs économiques, ce numéro contribue à la lutte contre les fraudes et garantit une meilleure traçabilité des marchandises. Les autorités douanières peuvent ainsi exercer un contrôle plus efficace tout en facilitant les échanges légitimes.
- Accélération des procédures de dédouanement – Un opérateur correctement identifié via son numéro EORI bénéficie généralement de délais de traitement optimisés. Les envois vers les DOM-TOM peuvent ainsi être dédouanés plus rapidement, réduisant les retards et les coûts associés.
- L’expérience montre que les opérateurs disposant d’un numéro EORI adapté au territoire concerné voient leurs démarches administratives grandement simplifiées. À l’inverse, l’absence de ce numéro ou l’utilisation d’un identifiant inapproprié peut bloquer totalement une expédition et générer des frais considérables.
Quand un numéro EORI est-il obligatoire pour les échanges avec les DOM-TOM ?
Cas d'obligation selon le statut de l'opérateur
L’obligation de disposer d’un numéro EORI varie selon plusieurs critères, notamment la nature de l’opération et le statut de l’opérateur économique :
Type d’opérateur | Obligation EORI |
Entreprise métropolitaine exportant vers les DOM | Obligatoire pour toute déclaration en douane |
Entreprise métropolitaine exportant vers les COM | Obligatoire avec particularités selon territoire |
Entreprise ultramarine importatrice (DOM) | Obligatoire au-delà de certains seuils |
Particulier (envois occasionnels) | Généralement dispensé sous certains seuils |
Pour les entreprises métropolitaines souhaitant exporter vers les DOM, le numéro EORI est systématiquement requis, quelle que soit la valeur des marchandises. Cette exigence s’explique par le fait que ces envois sont considérés comme des exportations au sens douanier, même si les DOM font partie intégrante du territoire français.
Concernant les seuils d’exemption, ils varient généralement en fonction de la valeur des marchandises. Dans certains cas, des envois de faible valeur (souvent inférieurs à 1 000€) peuvent être dispensés de certaines formalités, mais les règles diffèrent selon les territoires et évoluent régulièrement. 🔍
Spécificités selon les territoires
La réglementation EORI présente des nuances importantes selon qu’il s’agit des DOM ou des COM. Ces différences s’expliquent principalement par les statuts administratifs et fiscaux distincts de ces territoires.
Pour les Départements d’Outre-Mer (Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion, Mayotte), l’application du numéro EORI suit globalement les mêmes règles qu’en métropole. Toutefois, certaines particularités méritent d’être soulignées :
- En Guyane et à Mayotte, des procédures simplifiées existent pour les petits opérateurs locaux
- La Réunion applique parfois des contrôles renforcés nécessitant des vérifications supplémentaires du numéro EORI
En revanche, les Collectivités d’Outre-Mer présentent un cadre réglementaire bien plus hétérogène. La Polynésie française ou la Nouvelle-Calédonie, par exemple, disposent d’une autonomie douanière qui modifie considérablement l’utilisation du numéro EORI.
Territoire | Statut douanier | Application EORI | Spécificités |
Guadeloupe | DOM – Territoire douanier UE | Obligatoire | Standard UE avec octroi de mer |
Martinique | DOM – Territoire douanier UE | Obligatoire | Standard UE avec octroi de mer |
Polynésie française | COM – Hors territoire douanier UE | Partiellement requis | Système local complémentaire |
Nouvelle-Calédonie | COM – Hors territoire douanier UE | Partiellement requis | RIDET comme identifiant principal |
Comment obtenir un numéro EORI pour les échanges avec les DOM-TOM
Procédure pour les entreprises métropolitaines
L’obtention d’un numéro EORI pour les entreprises basées en France métropolitaine suit une procédure relativement standardisée, même lorsqu’il s’agit d’échanges avec les territoires ultramarins. Cette démarche s’effectue auprès des services douaniers français.
Pour les entreprises déjà immatriculées en France, le processus se déroule généralement en ligne via le portail SOPRANO de la douane française. Les documents nécessaires comprennent :
- Un extrait K-bis de moins de 3 mois
- Un justificatif de numéro SIRET
- Une pièce d’identité du représentant légal
Les délais d’obtention varient habituellement entre 24 et 48 heures pour une demande complète et correctement formulée. Il est toutefois recommandé d’anticiper cette démarche d’au moins une semaine avant tout projet d’expédition vers les DOM-TOM.
À noter que la validité du numéro EORI est illimitée tant que les informations de l’entreprise restent inchangées. Cependant, toute modification significative (changement d’adresse, de statut juridique, etc.) nécessite une mise à jour auprès des services douaniers.
Procédure pour les entreprises basées dans les DOM-TOM
Pour les opérateurs économiques installés dans les territoires ultramarins, la procédure d’obtention présente quelques spécificités selon la localisation géographique.
Dans les DOM (Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion, Mayotte), la demande s’effectue auprès du bureau de douane local compétent. Les entreprises doivent généralement fournir :
- Le formulaire Cerfa n°13930*01 dûment complété
- Un justificatif d’identification locale (K-bis ou équivalent)
- Une preuve d’activité commerciale internationale
Pour les entreprises situées dans les COM, le processus varie davantage. En Polynésie française par exemple, il convient de s’adresser d’abord aux services douaniers territoriaux qui coordonnent leur action avec l’administration douanière métropolitaine. Cette double démarche peut allonger les délais d’obtention, parfois jusqu’à plusieurs semaines.
Utilisation du numéro EORI dans les formalités douanières
Intégration dans les documents d'exportation/importation
Le numéro EORI constitue un élément central des documents douaniers lors d’expéditions vers ou depuis les territoires ultramarins. Son utilisation correcte conditionne souvent la fluidité du processus de dédouanement. 🔑
Sur le Document Administratif Unique (DAU), pièce maîtresse de toute déclaration en douane, le numéro EORI doit figurer dans la case 2 (expéditeur/exportateur) et/ou la case 8 (destinataire) selon le sens de l’opération. Cette identification permet aux systèmes informatiques douaniers de traiter automatiquement certaines vérifications.
Par ailleurs, ce numéro doit également apparaître sur d’autres documents connexes :
- Factures commerciales : généralement en en-tête ou dans les informations d’identification de l’expéditeur/destinataire
- Documents de transport : connaissements maritimes ou lettres de transport aérien
- Certificats d’origine lorsqu’ils sont requis pour bénéficier d’avantages tarifaires
L’absence ou l’erreur de numéro EORI sur ces documents peut entraîner des retards significatifs, voire un blocage complet de la marchandise. Les services douaniers ultramarins sont particulièrement vigilants sur ce point, compte tenu des risques spécifiques liés à l’éloignement géographique.
Un conseil pratique souvent partagé par les professionnels de la logistique ultramarine : toujours vérifier la concordance entre le numéro EORI utilisé et l’entité juridique réellement impliquée dans la transaction. Des incohérences à ce niveau constituent l’une des principales causes de retard dans les opérations de dédouanement vers les DOM-TOM.
Articulation avec l'octroi de mer et autres taxes spécifiques
Le numéro EORI joue un rôle fondamental dans la gestion fiscale des échanges avec les territoires ultramarins, notamment en ce qui concerne l’octroi de mer. Cette taxe spécifique aux DOM constitue souvent une source de confusion pour les opérateurs métropolitains.
L’identification correcte via le numéro EORI permet aux systèmes douaniers de calculer automatiquement le montant exact de l’octroi de mer applicable. Sans cet identifiant, les marchandises risquent d’être taxées au taux maximum, ce qui peut considérablement alourdir la facture finale.
Prenons l’exemple d’une entreprise métropolitaine expédiant des équipements électroniques vers la Martinique. Avec un numéro EORI valide, elle pourra bénéficier du taux réduit d’octroi de mer de 2,5% applicable à certaines catégories de produits. Sans ce numéro, le taux standard de 7% sera systématiquement appliqué, générant un surcoût significatif sur des expéditions régulières.
Situation fiscale | Avec EORI valide | Sans EORI valide |
Octroi de mer (Martinique) | Taux optimisé selon catégorie | Taux maximum par défaut |
TVA (Guadeloupe) | Exonération possible | Application systématique |
Droits de douane (COM) | Facilités procédurales | Contrôles renforcés |
Erreurs fréquentes et solutions concernant le numéro EORI pour les DOM-TOM
Problèmes courants rencontrés par les exportateurs
Malgré l’importance cruciale du numéro EORI, de nombreuses entreprises commettent des erreurs courantes qui peuvent gravement compromettre leurs opérations avec les DROM-COM.
Les erreurs les plus fréquentes sont les suivantes :
- Confusion entre identifiants douaniers : Il arrive fréquemment que les exportateurs confondent le numéro EORI avec d’autres codes tels que le numéro SIRET ou les identifiants fiscaux propres aux territoires d’outre-mer. Ces confusions peuvent entraîner un blocage total du dédouanement.
- Utilisation d’un numéro EORI obsolète : Après des changements administratifs (changement d’adresse, fusion d’entreprises), l’ancien numéro EORI est parfois encore utilisé sur les documents d’expédition. Les systèmes douaniers détectent cette incohérence, ce qui a pour conséquence de bloquer la marchandise.
- Omission du numéro EORI : L’absence pure et simple du numéro EORI est sans doute l’erreur la plus coûteuse. Les colis peuvent alors être retenus en douane pendant plusieurs semaines, générant des frais de stockage importants et pouvant même causer la détérioration de marchandises périssables. 🚫
Résolution des litiges et contacts utiles
Face aux difficultés liées au numéro EORI, plusieurs recours s’offrent aux opérateurs commerciaux :
Pour les erreurs d’enregistrement ou les mises à jour nécessaires, le service en ligne SOPRANO reste l’outil privilégié. Il permet des modifications rapides et traçables des informations EORI. En cas d’urgence, les Pôles d’Action Économique (PAE) des directions régionales des douanes peuvent intervenir pour débloquer certaines situations critiques en douane.
Les opérateurs ultramarins peuvent quant à eux s’adresser aux cellules conseil aux entreprises présentes dans chaque territoire. Ces services spécialisés connaissent parfaitement les spécificités locales et peuvent orienter efficacement les démarches de régularisation.
Pour les litiges plus complexes, notamment ceux impliquant des interprétations réglementaires divergentes, la Médiation des entreprises propose un dispositif de résolution amiable particulièrement adapté au contexte ultramarin.
À retenir : Numéro EORI : qu'est-ce que c'est et en ai-je besoin ?
Le numéro EORI constitue bien plus qu’une simple formalité administrative dans les échanges commerciaux avec les DOM-TOM. Véritable passeport douanier, il conditionne la fluidité des opérations et l’optimisation fiscale des flux de marchandises vers ces territoires aux statuts variés.
Pour les opérateurs économiques impliqués dans ces échanges, l’anticipation reste le maître-mot. Obtenir son numéro EORI avant toute opération, vérifier sa validité pour le territoire concerné et l’intégrer correctement dans l’ensemble des documents douaniers comme la facture commerciale permet d’éviter de nombreux désagréments.
Le contexte réglementaire des échanges avec les territoires ultramarins connaît par ailleurs des évolutions régulières. La réforme de l’octroi de mer prévue pour 2023 et les modifications progressives du statut de certaines collectivités pourraient modifier certaines modalités d’utilisation du numéro EORI. Une veille active sur ces questions reste donc indispensable pour tous les acteurs concernés.
FAQ : Numéro EORI
Un particulier envoyant un colis à sa famille en Guadeloupe a-t-il besoin d'un numéro EORI ?
Non, les particuliers sont généralement dispensés de cette formalité pour des envois non commerciaux de valeur limitée (moins de 1 000€). Toutefois, il est recommandé de vérifier les seuils en vigueur qui peuvent évoluer.
Mon numéro EORI obtenu pour exporter vers l'Allemagne est-il valable pour la Martinique ?
Oui, car la Martinique, en tant que DOM, fait partie du territoire douanier de l’Union européenne. Votre numéro EORI français est donc valable pour ces échanges.
Comment savoir si mon numéro EORI est toujours valide ?
La Commission européenne propose un service de vérification en ligne : le système « EORI Trader Portal » qui permet de contrôler instantanément la validité de votre numéro.
Existe-t-il des dispenses pour les petites entreprises ultramarines ?
Certaines PME des DOM-TOM réalisant des opérations occasionnelles peuvent bénéficier de procédures simplifiées. Ces facilités dépendent toutefois des seuils de valeur et des fréquences d’opération.


